Dr Sophie Lejeune – Service de Génétique – Hôpital Jeanne de Flandre – CHRU de Lille
Le syndrome de Lynch, du nom du cancérologue américain Henry Lynch qui le décrivit initialement, est une maladie génétique responsable d’une augmentation du risque de développer certains cancers, principalement colorectaux, mais également gynécologiques chez la femme (endomètre et ovaires). Cette maladie génétique est rare. Il ne représente que 3% à 5% des cancers du côlon et du rectum. Il est important d’en faire le diagnostic dans une famille afin de préciser les risques de cancer et les modalités de prise en charge à proposer aux différents membres de la famille.
1) Le diagnostic initial, le « cas index » La 1re personne de la famille initiant le bilan oncogénétique est appelée « cas index ». Il s’agit en général d’une personne ayant ou ayant eu un cancer colorectal et/ou gynécologique, vue en consultation d’oncogénétique à la demande de son chirurgien, de son médecin (oncologue, gynécologue, gastro-entérologue) ou à sa demande personnelle. Un arbre généalogique est établi, et si l’histoire personnelle et/ou familiale est évocatrice du syndrome de Lynch, une étude génétique lui est proposée afin de confirmer ou d’infirmer le diagnostic. Cette étude, réalisée à partir d’une prise de sang et si possible à partir de la tumeur lorsque le patient a été opéré, est longue (entre 6 et 12 mois) et non à la charge financière du patient. Les résultats de ce bilan lui sont rendus et expliqués par le médecin généticien au cours d’une consultation. Si le diagnostic de syndrome de Lynch est confirmé, des modalités spécifiques de prise en charge peuvent lui être recommandées. Par exemple, une femme ayant eu un cancer de l’utérus survenu dans le cadre de ce syndrome, se verra recommander une surveillance digestive par coloscopies régulières, tous les 2 ans, en raison du risque associé de cancer colorectal.
2) Les tests génétiques chez les apparentés Il s’agit pour le cas index d’une démarche à la fois personnelle et familiale. En effet, une fois le diagnostic établi, lui revient la charge d’en informer tous les membres de sa famille potentiellement concernés : (a) existence d’une maladie génétique au sein de la famille responsable d’un risque élevé de développer certains cancers ; (b) maladie pouvant toucher les hommes et les femmes ; (c) risque de 50% pour un sujet atteint de transmettre la maladie à ses enfants. De plus, lorsque le bilan génétique a permis d’identifier l’anomalie génétique (= mutation) responsable du syndrome de Lynch dans la famille, il est alors possible de proposer à tous les apparentés majeurs la réalisation d’un test génétique. Ce test a pour but de déterminer à partir d’une prise de sang si la personne est porteuse de la mutation responsable de la maladie, afin de mettre en place un suivi médical adapté si besoin. La réalisation de ce test génétique se fait à l’issue d’une consultation de génétique, au cours de laquelle une réflexion est menée sur les enjeux médicaux et psychologiques du test, avec dans la mesure du possible un encadrement psychologique et si besoin une période de réflexion. Les résultats sont connus beaucoup plus rapidement. On recommande en général de faire le test à partir 20 ans, car c’est à cet âge que débute la surveillance digestive par coloscopie dans le syndrome de Lynch.
3) L’importance de la transmission de l’ information La transmission de l’information dans la famille est donc PRIMORDIALE. En effet, un cousin, un oncle ou encore une nièce feront le test génétique, s’ils le souhaitent certes, mais avant tout s’ils ont été mis au courant de la possibilité de ce test. Afin de faciliter la transmission de cette information, des lettres destinées à tous les membres de la famille sont systématiquement remises au patient. Les possibilités et les difficultés potentielles de transmission de l’information au sein de la famille sont analysées avec le patient et des solutions sont envisagées au cas par cas.
4) Nécessité de consultations de suivi en oncogénétique Outre le suivi médical digestif et/ou gynécologique, il est important qu’un patient atteint d’un syndrome de Lynch bénéficie également d’un suivi oncogénétique afin de faire le point sur les modalités de sa prise en charge. En effet, celles-ci peuvent être modifiées en raison de l’évolution des connaissances médicales et scientifiques. Elles évoluent par ailleurs systématiquement en fonction de l’âge du patient : à 20, 40 ou 60 ans, les risques tumoraux évoluent, la prise en charge également.
Plus qu’une rencontre ponctuelle, la démarche en oncogénétique doit donc s’inscrire dans le temps comme un véritable accompagnement du patient dans son parcours médical.
S. Lejeune – Février 2012