Archives pour la catégorie Prévention des Polypes

Un vaccin préventif dans l’avenir ?

Dr Sylviane OLSCHWANG – INSERM U434

Après la mise en place de l’essai de chimioprévention par un traitement à l’aspirine et l’amidon (CAPP2), on peut s’attendre à l’exploration d’une nouvelle voie de recherche thérapeutique dans le syndrome HNPCC,l’immunothérapie. 

Le syndrome HNPCC résulte d’une mutation de l’un des gènes contrôlant la réparation des mésappariements de l’ADN (DNA MisMatchRepair, ou MMR), MSH2, MLH1 MSH6.

L’inactivation, dans une même cellule, des 2 copies d’un gène MMR a pour conséquence une impossibilité de correction des erreurs de réplication de l’ADN. Ces erreurs survenant préférentiellement au niveau de séquences répétées (appelées satellites) de l’ADN, dont la réplication est plus difficile, elles sont facilement détectables au niveau des séquences satellites courtes, ou microsatellites, d’où le terme d’instabilité microsatellite (MSI pour microsatellite instability) Cette instabilité, acquise par la cellule, est à l’origine de mutations de certains gènes contenant des séquences microsatellites, tel le gène du récepteur du TGFß (Tumor Growth Factor) de type II, qui contrôle la prolifération.
Les mutations du gène TGFßRII décalent le cadre ouvert de lecture, ce qui est à l’origine de la production de protéines anormales potentiellement immunogènes (figure 2). L’introduction d’un peptide de synthèse correspondant à la partie anormale de la protéine dans des lymphocytes T est capable d’induire une réponse immune. L’injection à des patients atteints de cancer, porteurs d’un syndrome HNPCC, a abouti à une régression des tumeurs.

(Saeterdal I, Bjorheim J, Lislerud K, et al. Frameshift-mutation-derived peptides as tumor-specific antigens in inherited and spontaneous colorectal cancer. Proc Natl Acad Sci USA 2001; 98:13255-13260).

Il est envisageable qu’à l’avenir, l’exploitation de cette observation aille jusqu’à la mise au point d’un vaccin préventif des cancers pour les personnes porteuses d’un syndrome HNPCC.

Dr Sylviane OLSCHWANG – Article du 08/12/02

Poursuite de l’essai clinique CAPP2 – Mars 2009

Dr Sylviane Olschwang – Centre de Recherche en Cancérologie de Marseille – Institut Paoli Calmettes

Comme annoncé dans les conclusions de l’étude à l’issue des résultats observés en fin de traitement parmi l’ensemble des participants, l’analyse se poursuit par la collecte des informations médicales disponibles deux ans après l’arrêt du traitement. Une évaluation des personnes ayant été les premières à débuter leur traitement dans les différents pays collaborateurs documente de manière convaincante le bien-fondé de la démarche, en indiquant que le taux de tumeurs détectées au cous de l’examen coloscopique systématique de dépistage était nettement moins important chez les personnes ayant effectivement reçu de l’aspirine. La France s’étant jointe à l’étude assez tardivement, il est maintenant temps de compléter les informations déjà disponibles et l’ensemble des participants français sera contacté en ce sens dans le courant du 1er trimestre 2009.
Les résultats définitifs seront disponibles vers la fin du mois de Juin 2009.

Dr Sylviane Olschwang – Institut Paoli Calmette

Les études CAPP (Concerted Action for Polyp Prevention)

Dr Sylviane Olschwang Institut Paoli-Calmettes et Centre de Recherches en Cancérologie de Marseille (UMR891) Octobre 2009

Les études CAPP (Concerted Action for Polyp Prevention) ont débuté en 1993 avec pour objectif d’identifier des substances qui pourraient prévenir l’apparition des polypes. Elles se sont d’emblée consacrées aux prédispositions au cancer colorectal, avec comme chef de file la polypose adénomateuse familiale, seule bien connue sur le plan génétique moléculaire à cette époque. Les susbstances pouvant faire l’objet d’une telle étude étaient l’aspirine et l’amidon non digestible, dont l’effet protecteur du cancer colorectal était tout au moins probable si ce n’est encore démontré dans la population générale. La première étude s’est naturellement appelée CAPP1. Elle n’est pas arrivée à son terme du fait du faible nombre de participants.
En parallèle, quelques années plus tard, une étude a débuté, CAPP2, posant la même question chez les personnes porteuses d’un syndrome de Lynch. La France y a significativement participé et les résultats au terme de l’étude* ont été rapportés dans des communications précédentes, accessibles sur le site http://hnpcc.france.free.fr.
En résumé, les participants se sont vu proposer une prise quotidienne pendant 2 ans de deux substances, qui comportait, seul ou en combinaison, après tirage au sort, de l’aspirine à la dose de 600mg et de l’amidon, digestible ou non digestible, à la dose de 30g. Un enregistrement des résultats des examens coloscopiques était fait au début et à la fin du traitement.
Au total, 953 personnes ont participé entre octobre 1999 et mars 2005, parmi lesquelles 746 personnes ont pris l’intégralité des substances pendant 2 ans. La France s’est trouvée être le second centre participant parmi un total de 43. Au terme de l’étude, l’analyse des examens coloscopiques n’a pas montré de différence significative en faveur de la réduction des polypes chez les participants ayant reçu les substances actives.
Une demande de prolongation de l’étude a été obtenue pour deux nouvelles observations des examens coloscopiques deux ans et quatre ans après la fin du traitement. En France, l’ensemble des participants a été contacté dans ce but au cours des 4 premiers mois de l’année 2009, et les informations communiquées au centre coordonateur. Une nouvelle analyse a été faite, et bien que tous les participants n’aient pas encore fini leur traitement depuis 4 ans, <bun effet protecteur de l’aspirine, comme supposé immédiatement au décours de la première analyse. Aujourd’hui, Il n’est évidemment pas encore possible de proposer l’aspirine comme traitement préventif du cancer colorectal dans le syndrome de Lynch, mais ce résultat est très encourageant. Lors du congrès biennal sur les prédispositions héréditaires aux cancers digestifs, organisé par la société INSiGHT, dont le dernier a eu lieu en juin 2009, le coordonateur des études CAPP a proposé une 3e phase, qui consistera a définir la dose d’aspirine efficace minimale, la dose testée (600 mg par jour) n’étant pas dénuée d’effets secondaires potentiels.
Tous les participants recevront donc un traitement à base d’aspirine, dont la dose seule variera. L’analyse des effets sera établie sur l’enregistrement des résultats coloscopiques, comme dans les précédentes études.
Une recherche de financement est en cours.

* Burn J, Bishop T, Mecklin J, Macrae F, Moeslein G, Olschwang S,
Effect of Aspirin or Resistant Starch on Colorectal Neoplasia in the Lynch Syndrom. New Engl J Med 2008; 359:2567-78

Dr Sylviane Olschwang – Octobre 2009

Poursuite de l’Etude avec CAPP3 – Oct 2011 L’aspirine réduit le risque de développer un cancer colorectal de moitié chez les personnes porteuses d’un syndrome de Lynch

Dernières nouvelles des Programmes de Prévention des Adénomes et Cancers colorectaux CAPP.
Dr Sylviane Olschwang a adapté le texte proposé par le Pr. John Burn, coordinator de l’étude (Newcastle upon Tyne, UK) publié dans “Lancet” le 28 Octobre 2011 : «Long-term effect of aspirin on cancer risk in carriers of hereditary colorectal cancer : an analysis from the CAPP2 randomised controlled trial.»*

L’essai international CAPP2 a montré que le bénéfice d’un traitement au long cours par l’aspirine se prolongeait plusieurs années après l’arrêt du traitement. Cet essai contrôlé randomisé démontre statistiquement l’effet bénéfique, qui était soupçonné depuis environ 20 ans, mais n’avait encore jamais fait l’objet de ce type d’étude. En effet, l’action préventive avait jusque là été observée chez des personnes prenant de l’aspirine dans le but de prévenir les maladies cardiovasculaire uniquement.
En résumé cette étude a été menée par 23 équipes dans 16 pays différents, et a permis de suivre spécifiquement un millier de personnes sur des périodes allant jusqu’à 10 ans. Le traitement était proposé aux seules personnes porteuses d’un syndrome de Lynch, ce qui donne toute la valeur aux résultats obtenus. Plus précisément, la dose d’aspirine proposée était de 600 mg par jour (ou placebo) et la durée du traitement de 2 ans. Au terme du traitement (2007), aucune différence significative n’avait été mise en évidence entre les deux groupes de personnes, mais l’effet bénéfique est apparu très clair deux ans plus tard et perdure au-delà : entre 2005 et 2010, 19 personnes traitées se sont vues diagnostiquer un cancer colorectal, contre 34 personnes prenant le placebo. Lorsque l’analyse s’est concentrée sur les personnes qui ont suivi le traitement régulièrement pendant les deux ans prévus, la réduction du nombre de tumeurs était plus importante : 10 tumeurs chez les personnes traitées, 23 chez celles recevant le placebo. Un résultat comparable a été observé pour le cancer de l’endomètre, avec une diminution par deux chez les femmes traitées à l’aspirine.
Les observations des précédentes études, même si elles n’étaient pas spécifiques au syndrome de Lynch, laissent penser que des doses moindres auront un effet identique. Aussi est-il maintenant important dedéfinir la dose optimale, et c’est l’objet de l’étude CAPP3 que propose le Pr. Burn, dont toutes les informations (en anglais) figurent à l’adresse suivante : www.capp3.org. Cette étude est librement accessible aux personnes concernées.

Après signature d’un souhait de participation, une dose quotidienne d’aspirine est proposée et il est simplement demandé aux participants de fournir les résultats de leurs examens de dépistage régulièrement, avec ou sans l’aide de leur médecin. 

Toute l’équipe de l’étude CAPP2 remercie les nombreux participants et les incite naturellement à consulter le site Internet. www.capp3.org
– Le Dr S. Olschwang est à votre disposition pour répondre par email aux questions que sa consultation susciterait. sylviane.olschwang@inserm.fr

Novembre 2011

* Burn J, Bishop T, Mecklin J, Macrae F, Moeslein G, Olschwang S,
Effect of Aspirin or Resistant Starch on Colorectal Neoplasia in the Lynch Syndrom. New Engl J Med 2008; 359:2567-78

Dr Sylviane Olschwang – Octobre 2009