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Examens biologiques, délais, mode d’emploi contrôle qualité, comparatifs pays européens concernant l’analyse des gènes MMR

Sylviane Olschwang – Institut Paoli-Calmettes et Centre de Recherches en Cancérologie de Marseille (UMR891) – octobre 2009

Le réseau des laboratoires prenant en charge les analyses génétiques constitutionnelles des personnes ayant un risque de prédisposition héréditaire au cancer colorectal a vu le jour en 2000. Il a pour objectifsd’harmoniser les méthodes d’analyse moléculaire, de développer et valider les nouvelles techniques, de définir les stratégies optimales au regard des demandes des médecins prescripteurs, et de fédérer les activités de recherche clinique à même d’améliorer la prise en charge médicale. Pour cela, il s’est réuni tous les 4 mois jusqu’en 2008, et a adopté le rythme d’une réunion semestrielle à partir de 2009.

Ses travaux ont permis la publication de 11 observations originales dans des revues scientifiques internationales. Il contribue à l’enrichissement de la base nationale des mutations des gènes MMR, en discutant systématiquement l’interprétation des résultats qui ne permettent pas une conclusion médicale ; en d’autres termes, lorsque certaines variations des gènes MMR sont identifiées au cours des analyses, il n’est pas toujours possible de dire formellement si elles sont ou non la cause d’un syndrome de Lynch.

 Le travail du réseau consiste alors à réunir le maximum d’arguments permettant d’aider à conclure ou à proposer des analyses biologiques complémentaires, voire le développement de techniques spécifiques. 

Le réseau promeut la participation à des contrôles de qualité, qui sont des facteurs d’amélioration des performances. Les laboratoires, pour réaliser des analyses génétiques constitutionnelles dans un but médical, ont une obligation légale d’agrément à la fois des locaux et des praticiens. L’ensemble des laboratoires du réseau est en outre dans une démarche d’accréditation ou de certification. La synthèse de cette activité, financée par l’INCa, témoigne de la performance des laboratoires, qui identifient une mutation dans un gène MMR chez environ 25% des patients pour lesquels l’analyse a été prescrite. Elle témoigne également de la qualité des prescriptions, les recommandations d’analyse proposées en 2003 ayant été faites pour qu’une analyse soit prescrite aux patients si leur probabilité d’être porteur d’une mutation est supérieure à 0,20.

Au-delà de l’organisation nationale, l’Europe a plus récemment mis en place une structure appeléeEuroGentest qui a à peu près les mêmes objectifs que notre réseau, dépassant toutefois largement le cadre du syndrome de Lynch, puisqu’elle brosse les pratiques de l’ensemble de la génétique, moléculaire et médicale. Cette structure produit des « cartes génétiques » spécifiques à chaque syndrome, et intègre le réseau européen de contrôle de la qualité des examens de génétique moléculaire EMQN, qui organise annuellement un contrôle externe pour les maladies génétiques les plus fréquentes. Depuis leur mise en place, la France contribue de manière majeure à l’organisation de ces contrôles pour les gènes MMR et les gènes BRCA, auxquels les laboratoires participent chaque année davantage. Concernant le syndrome de Lynch, elle a également en charge la maintenance de sa « carte génétique ».

D’une manière générale, les performances des laboratoires se sont significativement améliorées, avec un quasi- « sans faute » en 2008 pour ce qui est des résultats expérimentaux, et encore un effort à faire pour leur interprétation (en 2008, 81 laboratoires de 22 pays différents ont participé, et leur nombre dépasse la centaine en 2009). Cette dernière étape, sans aucun doute la plus difficile du parcours analytique, bénéficie désormais grandement des travaux du réseau et de la base nationale de mutations, la totalité des connaissances concernant chaque variation des gènes MMR étant accessible à tous les laboratoires membres. 

>> Bilan et chiffres

Dr Sylviane Olscwhang – Octobre 2009

Estimation des risques tumoraux dans le syndrome de Lynch – Résultats de l’étude française ERISCAM – Mise à Jour 2010

Dr Valérie BONADONA, Unité Clinique d’Oncologie Génétique & CNRS UMR 5556 Unité de Prévention et Epidémiologie Génétique, Centre Léon Bérard, Lyon (Tours Oct 2010)

Le syndrome de Lynch, encore appelé syndrome HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer) est la prédisposition héréditaire au cancer colorectal la plus fréquente, expliquant 3 à 5 % des cancers du côlon et du rectum. Se transmettant sur un mode autosomique dominant, elle est liée à la présence d’une mutation constitutionnelle d’un gène MMR (MisMatch Repair) ; principalement les gènes MLH1, MSH2 et MSH6, impliqués dans la réparation des mésappariements de l’ADN lors de la réplication. Caractérisé par un large spectre tumoral (« spectre HNPCC »), le syndrome de Lynch confère des risques élevés de développer un cancer colorectal et de l’endomètre, et des risques plus modérés de développer un cancer de l’intestin grêle, des voies excrétrices urinaires, des voies biliaires, de l’estomac et de l’ovaire.

Il est essentiel de connaître précisément les risques tumoraux pour chaque localisation du spectre HNPCC afin de conseiller au mieux les patients et leur famille et de déterminer la prise en charge optimale à leur recommander. Beaucoup d’études publiées dans la littérature ont surestimé les risques de cancer dans le syndrome de Lynch car les méthodes de calcul utilisées n’ont pas tenu compte de la sélection des familles sur de multiples cas de cancer (risques « biaisés », plus élevés que les risques réels). Quelques études récentes ont une approche méthodologique adéquate mais elles portent sur un petit nombre de familles, soulignant la nécessité de conduire de plus vastes études.

Sous l’impulsion des docteurs Catherine Bonaïti, Christine Lasset, Sylviane Olschwang et Sophie Grandjouan, une étude nationale multicentrique a été réalisée, avec pour objectif d’estimer de façon fiable et précise les risques des différentes tumeurs chez les sujets porteurs d’une mutation d’un gène MMR, en utilisant une méthode statistique corrigeant le biais de sélection des familles (Carayol et Bonaïti-Pellié, 2004). Il s’agit de l’étude ERISCAM (Estimation des RISques de CAncer chez les porteurs de mutation des gènes MMR) rassemblant les données de 537 familles françaises avec une mutation d’un gène MMR identifiée (248 familles avec un gène MLH1 muté, 256 avec MSH2 muté, 33 avec MSH6 muté) et recrutées par les 40 centres de consultation d’oncogénétique participants à l’étude, tous membres du Groupe Génétique et Cancer.

Les risques de cancer qui sont présentés dans l’étude ERISCAM sont des risques cumulés en fonction de l’âge, appelés « pénétrances », concernant une personne âgée de 20 ans (risques de développer un cancer au cours de la vie à partir de 20 ans). Ainsi, le risque cumulé de cancer colorectal à 50 ans correspond au risque de développer ce cancer entre 20 et 50 ans (au cours des 30 prochaines années) ; le risque à 70 ans correspond au risque de le développer entre 20 et 70 ans (au cours des 50 prochaines années). A noter que pour une personne plus âgée (> 20 ans), ce risque est plus faible car calculé sur une période de vie plus courte (on retranche au risque initial le risque correspondant aux années vécues en bonne santé).

Globalement pour l’ensemble des 3 gènes, le risque cumulé de développer un cancer du spectre HNPCC à 70 ans est estimé à : 45 % (Intervalle de confiance à 95% : 32-59) chez l’homme et 54 % (41-70) chez la femme. Le risque de cancer colorectalà 70 ans est de 38 % (25-59) chez l’homme et 31 % (19-50) chez la femme. Chez cette dernière, le risque de cancer de l’endomètre à 70 ans est de 33 % (16-57) et le risque de cancer de l’ovaire à 70 ans de 9 % (4-31). Les risques cumulés à 70 ans des autres localisations sont de 1,9 % (0,3-5,3) pour les voies excrétrices urinaires, 0,6 % (0,2-1,3) pour l’intestin grêle, 0,7 % (0,1-6 %) pour l’estomac et 0,6 % (0,07-2) pour les voies biliaires.
Les risques sont différents en fonction du gène muté, avec des risques plus faibles pour MSH6 en comparaison de MLH1 et MSH2. Les risques cumulés de développer un cancer du spectre HNPCC à 70 ans sont pour MLH1 et MSH2, respectivement de 59 % (44-79) et 57 % (38-78), contre 25 % (17-41) pour MSH6.
Les risques cumulés de cancer colorectal à 50 ans sont pour MLH1, MSH2 et MSH6 respectivement de 14% (8-27), 20 % (13-30) et 3% (2-6) et les risques correspondants à 70 ans sont de 41 % (25-70), 48 % (30-77), et 12 % (8-22). Les risques de cancer de l’endomètre à 50 ans sont respectivement pour MLH1, MSH2 et MSH6 de 9 % (3-19), 8 % (3-21) et 3 % (1-8) et à 70 ans, de 54 % (20-80), 21 % (8-77) et 16 % (8-32) ; pour l’ovaire, les risques correspondants à 50 ans sont de 4 % (0-11), 4 % (1-9) et 0 % (0-1) et à 70 ans, de 20 % (1-65), 24 % (3-52) et 1 % (0-3).

ERISCAM est à ce jour la plus importante étude ayant estimé sans biais les risques de cancer dans le syndrome de Lynch. ERISCAM confirme des risques de cancer colorectal (CCR) plus faibles que ceux initialement publiés par les études ne tenant pas compte du biais de recrutement des familles.

Néanmoins, les risques de CCR associés aux mutations des gènes MLH1 et MSH2 justifient les recommandations actuelles de prise en charge, coloscopie tous les 2 ans dès l’âge de 20 ans. En revanche, les mutations du gène MSH6 sont associées à un risque de CCR notablement plus faible, ce qui plaide pour différer le début du dépistage par coloscopie vers 30 ou 35 ans (risque cumulé de CCR de 1% à 40 ans). ERISCAM a permis de mieux préciser les autres risques de cancer dans le syndrome de Lynch. Elle montre que les risques de cancer de l’endomètre et de l’ovaire à 70 ans sont élevés pour les gènes MLH1 et MSH2, justifiant de proposer une hystérectomie et une ovariectomie prophylactiques, en l’absence actuelle d’examens de dépistage performant. Néanmoins les risques sont faibles avant l’âge de 40/50 ans (risque cumulé à 40 ans de 1-2 % pour l’endomètre et de 0-1 % pour l’ovaire), ce qui plaide pour réaliser une chirurgie préventive vers 45 ans (voire 50 ans). Les risques sont plus faibles pour MSH6 ce qui rend un geste prophylactique plus discutable.
Les risques des autres localisations sont faibles ne justifiant pas d’une prise en charge systématique.

Les résultats de l’étude ERISCAM vont contribuer à définir une prise en charge plus personnalisée chez les sujets concernés par le syndrome de Lynch.


L’ensemble des responsables et des investigateurs de l’étude ERISCAM tient à remercier vivement les patients et leurs familles pour leur précieuse contribution

Valérie Bonadona – Oct 2010

Critère de qualité de la coloscopie

Docteur Didier BARBEREAU, Gastoentérologue & Professeur Thierry LECOMTE Service d’Hépato- gastroentérologie Hôpital Trousseau, CHRU de Tours et UMR CNRS 6239 (GICC), Université François Rabelais, Tours (Tours Octobre 2010)

Pourquoi une coloscopie de qualité dans le syndrome HNPCC ?

Le syndrome HNPCC est associé à un risque très élevé de cancer colorectal dont le dépistage repose sur une coloscopie effectuée tous les ans ou tous les deux à partir de l’âge de 20 à 25 ans. Le but de la coloscopie est de permettre le diagnostic et/ou le traitement des lésions colorectales pré-cancéreuses et cancéreuses superficielles dont la résection peut généralement être effectuée par polypectomie ou mucosectomie endoscopique. Dans ce cadre, la coloscopie permet également un diagnostic précoce du cancer colorectal à un stade souvent peu avancé.

La coloscopie doit être totale
avec une visualisation parfaite du bas fond caecal car le cancer du côlon est souvent localisé au niveau du côlon droit dans le syndrome HNPCC. La préparation colique devra donc être optimale afin de permettre une visualisation de l’ensemble du côlon jusqu’au caecum.

Une autre particularité du syndrome HNPCC est la fréquence des lésions de petite taille et/ou des lésions planes qui sont plus difficiles à détecter en endoscopie. La détection de ces lésions, lors d’une coloscopie de dépistage chez les patients atteints d’un syndrome HNPCC, est facilitée par la coloration de la muqueuse colorectale au moyen du colorant indigo carmin (colorant de surface accentuant le relief muqueux). Cette technique est appelée chromoscopie ou chromoendoscopie et doit être systématique dans le syndrome HNPCC. Une étude française multicentrique a en effet démontré que le recours à cette technique permet de détecter deux fois plus de lésions pré-cancéreuses colorectales (les adénomes) que lors d’une simple coloscopie « standard » de dépistage chez les patients atteints d’un syndrome HNPCC. Il s’agit de l’étude CHROENDOHNPCC financée dans le cadre d’un programme hospitalier de recherche clinique [coordonateur : Pr Christophe CELLIER (Paris) ; responsable scientifique : Pr Thierry LECOMTE, (Tours)].

La principale cause d’échec de la coloscopie
est une mauvaise préparation colique. Deux facteurs sont associés à l’échec de la préparation colique :
1/l’existence d’une constipation qui nécessitera d’optimiser la préparation colique par l’association éventuelle à des lavements évacuateurs et/ou un traitement laxatif dans la semaine précédant la coloscopie.
2/la prise incomplète de la préparation colique en rapport avec des problèmes d’acceptabilité et d’observance de l’ingestion de la purge liés à un volume ingéré trop important, à un mauvais goût de la préparation et à l’existence de nausées et de vomissements (cf. intérêt de la prise fractionnée +/- la prescription d’anti-nauséeux).

Une mauvaise préparation colique est observée dans 10 à 20% des cas. Elle a pour conséquences une augmentation du taux de coloscopie incomplète, une coloscopie techniquement plus difficile et de durée plus longue avec un risque accru de complications, une réduction de 50 % du nombre des lésions pré-cancéreuses colorectales détectées (avec potentiellement un moindre impact sur la réduction de mortalité liée au cancer colorectal), la nécessité de refaire la coloscopie dans un délai inférieur à trois mois lorsque celle-ci a été incomplète ou d’anticiper la coloscopie suivante par exemple à un an lorsque la coloscopie a pu être totale, et enfin un impact économique (cf. augmentation du coût).

Comment effectuer une préparation colique de qualité afin de passer d’un côlon rempli de matières fécales à un côlon parfaitement propre ?

Six étapes fondamentales sont à respecter.
1. La consultation initiale du gastroentérologue est très importante, permettant de valider l’indication de la coloscopie, d’expliquer le déroulement de l’examen et les gestes thérapeutiques éventuels, d’évaluer le rapport bénéfice/risque, d’obtenir le consentement éclairé du patient et de choisir et d’expliquer les modalités de la préparation en tenant compte de l’âge du patient, des pathologies et des traitements associés ainsi que des résultats et de la tolérance des éventuelles préparations coliques précédentes.
2. L’examen est effectué le plus souvent sous sédation ce qui justifie une consultation pré anesthésique dans les 8 à 10 jours précédant l’examen. Cette consultation a pour but de faire le point sur d’éventuelles allergies et contre-indications à l’anesthésie, les traitements associés et de vérifier que le patient remplit les conditions d’une hospitalisation ambulatoire compatible avec une sortie dans les heures suivant la réalisation de la coloscopie.
3. Le régime sans résidu (« sans fibres ni pépins) reste habituellement recommandé 2-3 jours avant l’examen. Il consiste en la suppression des fruits, des légumes et du pain. Les aliments autorisés sont des féculents (pâtes, riz, pommes de terre, semoule), des biscottes (en remplacement du pain) et des fromages à pâte dure (type gruyère, comté, emmental….).
4. Une diète alimentaire est impérative durant les 12 heures précédant l’examen.
5. La prise fractionnée de la purge est à privilégier pour en améliorer l’acceptabilité et l’observance. L’idéal est une prise de la purge en deux fois avec une pause nocturne (cf. ingestion la veille et le jour de l’examen).
6. La dernière prise de liquide doit être faite 3 à 4 heures avant l’examen pour des raisons de sécurité anesthésiques.

Quel Lavage Intestinal ?

Il existe trois types de produits dont deux nouveaux (Colokit et Citrafleet) commercialisés depuis septembre 2010. Ces derniers devraient permettre une meilleure acceptabilité de la préparation coloscopique. A signaler que leur utilisation lors de coloscopie de dépistage dans le syndrome HNPCC n’a pas été spécifiquement évaluée. Chaque type de produit présente des avantages et des inconvénients dont il sera tenu compte lors de la prescription.

1. Les PEG (Polyéthylène-Glycol)
ont été les premiers commercialisés (Colopeg, KleanPrep et Fortrans) Il s’agit de laxatifs « doux » de type osmotique qui augmentent le volume des liquides intestinaux. Ce sont des sachets à dissoudre dans l’eau. Le principe repose sur l’ingestion de quatre litres de purge au rythme de 1,5 l par heure, idéalement en deux prises (trois litres la veille et un litre le matin de l’examen ou deux litres la veille et deux litres le matin de l’examen). L’avantage de ces produits est la quasi-absence de contre indication (en dehors de l’occlusion). Leurs inconvénients sont la quantité de liquide à ingérer et leur goût. Un PEG particulier est le Moviprep (PEG + acide ascorbique) dont l’avantage est une quantité à ingérer réduite à deux litres en deux heures (idéalement un litre la veille et un litre le matin de l’examen) associée à l’ingestion d’un litre de liquide clair. L’inconvénient de ce produit est qu’il n’est pas remboursé avec un coût de l’ordre de 20 à 25 €.

2. Les phosphates de sodium
*Le Fleet Phospho-soda. Il se présente sous la forme de deux petits flacons de 45 ml à diluer dans 250 ml d’eau, à ingérer en deux prises avec un intervalle d’au moins huit heures entre les deux prises et associés à l’ingestion d’au moins deux litres de liquide clair. Contrairement aux PEG il s’agit d’un laxatif « irritant » pouvant entraîner des désordres hydro-électrolytiques et comportant donc plusieurs contre indications (notamment chez le sujet âgé de plus de 75 ans, en cas de pathologie cardiaque ou rénale et en cas de certains traitements associés).
*Le Colokit est une nouvelle forme galénique de phosphate de sodium commercialisé sous forme de comprimés (boîte de 32 comprimés) dont le principe repose sur l’ingestion de 4 comprimés tous les quarts d’heure avec 250 ml d’eau ou d’un autre liquide clair. Un total de 32 comprimés doit donc être absorbé pour obtenir une bonne préparation colique. Deux modes d’administration sont possibles : en cas de coloscopie en fin de matinée ou dans l’après-midi, la prise de 20 comprimés la veille au soir et des 12 comprimés restants le jour de la coloscopie 4 à 5 heures avant l’examen; en cas de coloscopie le matin, la prise de 20 comprimés la veille au soir à 18h et la prise des 12 comprimés restants la veille au soir à 22h.

3. Le Citrafleet
Il s’agit d’une toute nouvelle préparation coloscopique associant du picosulfate de sodium, de l’oxyde de magnésium et de l’acide citrique anhydre. Il se présente sous forme de deux sachets avec un arôme citron. Le mode d’administration est simple, reposant sur l’ingestion d’un sachet dilué dans 150ml d’eau à 6 ou 8 heures d’intervalle avec une hydratation importante de 1,5 l d’eau ou de liquide clair après l’ingestion de chaque sachet tant que l’effet laxatif persiste.

En conclusion une coloscopie de qualité repose sur un binôme motivé :


– Un gastroentérologue motivé
qui effectuera une chromocoloscopie totale (= coloscopie avec coloration à l’indigo carmin), la résection par polypectomie et/ou mucosectomie des lésions détectées et utilisera un matériel de dernière génération (haute définition, zoom, réhaussement de structure, coloration virtuelle NBI ou FICE et bistouri électrique endocoupe). Actuellement, les colorations virtuelles pour la détection des lésions pré-cancéreuses dans le syndrome HNPCC sont en cours d’évaluation et, dans l’état actuel de nos connaissances, elles ne peuvent pas se substituer à la chromoscopie à l’indigo carmin.

– Un patient motivé
pour effectuer une coloscopie de dépistage tous les deux ans et une préparation colique optimale.
Il faut souligner le rôle primordial de l’Association HNPCC – Lynch pour l’information de ce syndrome auprès des patients et des médecins.

Didier Barbereau & Thierry Lecomte – Oct 2010

La coloscopie dans le dépistage du cancer colorectal : mode d’emploi

Pr Etienne DORVAL – Hépato-gastro-entérologie – CHRU de Tours (Tours Octobre 2010)

La coloscopie totale est l’examen de choix pour le dépistage du cancer colorectal. Elle permet chez des sujets sans symptômes, de découvrir des polypes ou des cancers à un stade précoce c’est-à-dire pour lesquels un traitement par coloscopie ou chirurgie simple conduit, dans la majorité des cas, à la guérison sans chimiothérapie. L’objectif de ce dépistage est de réduire la mortalité par cancer colorectal. Dans ce cadre les indications de la coloscopie (pour qui, quand, à quel âge, avec quelle fréquence ?) sont très variables et directement liées au risque individuel de cancer colorectal du sujet. L’évaluation du niveau de risque personnel de cancer colorectal est donc un élément particulièrement important pour indiquer utilement cet examen qui n’a, certes, que très peu de complications mais nécessite une préparation intestinale soigneuse et une anesthésie au cours d’une hospitalisation ambulatoire.

Schématiquement on distingue 3 niveaux de risque pour le cancer colorectal. Le risque moyen (cancer ‘sporadique’) est celui de la population générale. En France on estime ce risque à environ 4 % ; ceci signifie qu’un français sur 25 environ aura un cancer colorectal au cours de sa vie en dehors de tout contexte de risque élevé ou très élevé. 75% environ des cancers observés correspondent à ce risque.

Le risque élevé (familial) est celui des sujets qui ont déjà eu un ‘gros’ polype adénomateux ou un cancer colorectal ou dont un parent au 1er degré a été lui-même atteint avant 60 ou 65 ans d’un cancer colorectal ou d’un gros polype adénomateux du côlon. Ce risque est 2 à 3 fois plus élevé que celui de la population générale et concerne environ 20% des cancers colorectaux observés.

Le risque très élevé (génétique) concerne les sujets ayant une prédisposition héréditaire au cancer colorectal en particulier dans la polypose adénomateuse familiale, les polyposes atténuées et le syndrome de Lynch (HNPCC). Le risque de cancer colorectal est ici le plus élevé variant d’une affection à l’autre de 40 à 100%. L’histoire familiale, les données obtenues sur un sujet index de la famille et l’identification du gène en cause sont des éléments capitaux de l’évaluation de ce risque qui concerne environ 5% de la population. Les indications de la coloscopie dans le dépistage du cancer colorectal sont adaptées à ces niveaux de risque mais il faut rappeler que, quel que soit le niveau de risque, les indications de la coloscopie de dépistage énoncées ci-dessous ne concernent que les sujets sans symptômes et que la présence de symptômes (douleurs, sang rouge dans les selles, troubles du transit etc.) est certes une autre indication potentielle de la coloscopie mais à visée diagnostique cette fois.

Pour le risque moyen (sporadique) la coloscopie est indiquée dans le cadre du dépistage organisé du cancer colorectal. Ce dépistage s’adresse aux sujets asymptomatiques âgés de 50 à 74 ans sans antécédents familiaux ou personnels de cancer colorectal. Il comporte la réalisation tous les 2 ans d’une recherche de sang microscopique dans les selles, actuellement par le test Hemoccult II®, et la pratique d’une coloscopie seulement si le test de recherche de sang est positif (soit environ chez 2 % des sujets).

Pour le risque élevé (familial) la coloscopie est indiquée dans la famille au 1er degré des sujets atteints d’un cancer colorectal à un rythme de tous les 5 ans en commençant à 45 ans ou 5 ans avant le cas index.

Pour le risque très élevé (génétique) la coloscopie est indiquée tous les 1 à 2 ans en commençant vers 10 ans dans la polypose familiale, 20 ans dans le syndrome de Lynch et 30 ans dans les polyposes atténuées. D’autres dépistages (gynécologiques, digestifs, urinaires etc.) peuvent être également associés chez ces sujets exposés également à d’autres cancers.

Les résultats de ces stratégies de dépistage
ont été évalués ; tous conduisent à une réduction importante de la mortalité par cancer colorectal qui va d’environ moins 30% dans la population soumise au dépistage organisé pour le risque moyen à moins 80-90% chez les sujets avec antécédent familial et moins 60-70% dans le syndrome de Lynch… sous réserve de la participation effective au dépistage ce qui montre que le cancer colorectal peut être prévenu et dépisté et que l’important est de participer selon des modalités adaptées au niveau de risque individuel de cancer.

Pr Etienne Dorval – Nov 2010

La mutation – Le phénotype RER – Le cancer

Dr Isabelle Mortemousque Service de Génétique -Hôpital Bretonneau CHRU de Tours (Tours 2010 & Fév 2011)

L’identification, dans une famille, d’un Syndrome de HNPCC/Lynch est maintenant fréquemment guidée par le résultat du phénotype RER étudié sur la pièce opératoire. Ce phénotype RER, également nommé phénotype MSI ou instabilité des microsatellites, est le reflet de l’effet de la mutation génétique sur certaines cellules de l’organisme.

Pour comprendre ce mécanisme, il faut se souvenir de plusieurs points importants :
L’ensemble de notre patrimoine génétique (environ 30 000 gènes) est présent dans chacune de nos cellules. Nos gènes sont portés par la molécule d’ADN, qui peut être comparée à un filament de diamètre infiniment petit mais extrêmement long (en agrandissant ce filament avec le diamètre d’un cheveu, celui-ci atteindrait 8 km de long !!!)
Tous nos gènes sont présent en 2 copies : une copie maternelle, une copie paternelle.
– Chaque gène peut être considéré comme une « recette de cuisine » qui permet à la cellule de fabriquer la protéine correspondante qui elle est active. L’ADN fonctionne avec un alphabet à 4 lettres : A, T, C, G. C’est la succession de ces lettres, dans un ordre bien précis (la séquence) qui caractérise un gène. Cette séquence est alors reconnue par la cellule qui peut fabriquer la protéine correspondante (si elle en a besoin pour son fonctionnement).
Etre porteur d’une mutation génétique du syndrome de Lynch signifie que toutes nos cellules portent un défaut génétique sur 1 copie du gène (notamment nos cellules reproductrices – ovaires ou testicules – ce qui explique que cette mutation puisse être transmise à la descendance). L’autre copie du gène étant présente et normale, la protéine peut toutefois être fabriquée.
– Les organes à risque sont ciblés car l’impact de ce défaut génétique va se manifester au sein d’organes à renouvellement cellulaire rapide (colon et utérus préférentiellement).
– Nos cellules se renouvellent régulièrement et ce de façon physiologique ; quand une cellule meurt, une cellule voisine se divise pour rétablir le stock cellulaire. En se divisant, cette cellule doit recopier l’ensemble de son patrimoine génétique ; ce qui correspond à des milliards d’informations qui doivent être recopiées fidèlement, sans erreur, sans faute d’orthographe … Par comparaison, cette banque de données est assez grande pour remplir une encyclopédie de 900 volumes …
A chaque division cellulaire, la cellule « mère » dispose d’un dispositif complexe ayant pour but de recopier le patrimoine génétique complet (tous les gènes) afin de le transmettre à la cellule « fille ». Il paraît donc extrêmement difficile à la cellule d’assurer un recopiage fidèle et les « fautes d’orthographe » (ou erreurs de copie) sont fréquentes mais sont, pour la plupart, sans conséquence.

Rappelons-nous toutefois qu’un individu porteur d’un syndrome de Lynch est porteur d’un défaut génétique sur l’une des 2 copies d’un gène MMR (MLH1, MSH2, MSH6 ou PMS2), l’autre copie du gène étant normale
. De par le renouvellement cellulaire incessant au sein des muqueuses notamment coliques et utérines, les fautes d’orthographes sont fréquentes lors des divisions cellulaires et peuvent concerner la copie normale du gène MMR impliqué. Dans ce dernier cas la cellule ne disposera plus de copie normale du gène impliqué et ne sera donc plus capable de fabriquer la protéine active correspondante.

Les protéines MMR, fabriquées à partir des gènes MMR, ont pour but de repérer les erreurs de copie lors du recopiage de l’ADN (les « fautes d’orthographes). Si ce système est défaillant, les erreurs de copie auront tendance à s’accumuler lors des divisions cellulaires successives. En effet, une cellule qui aura « perdu » les 2 copies du gène MMR impliqué, ne disposera plus du système de corrections des erreurs de copie. Cette cellule, en se divisant : – d’une part, transmettra, à la cellule fille, les 2 copies anormales du gène MMR, – et d’autre part, recopiera son ADN avec un nombre plus important d’erreurs de copie car le système de correction ne fonctionne pas correctement.

Le dysfonctionnement de ce système de correction des erreurs de copie a deux principales conséquences :
1) Une instabilité des microsatellites (ou phénotype RER ou MSI). Les microsatellites sont des portions de l’ADN caractérisées par des séquences répétées de nombreuses fois.
Prenons l’exemple d’un motif « CG » répété 10 fois pour un individu donné dans chacune de ces cellules : « CGCGCGCGCGCGCGCG ». Ces séquences répétées sont situées entre les gènes et n’ont pas, à priori, de rôle précis identifié ; mais ces séquences sont évidemment transmises lors des différentes divisions cellulaires. Les cellules ont cependant beaucoup de difficultés à recopier fidèlement ces motifs répétés avec une tendance à diminuer ou à augmenter le nombre de répétitions initiales. Les protéines MMR, quand elles fonctionnent correctement permettent de stabiliser le nombre de répétitions : 10 répétitions dans la cellule « mère » Þ 10 répétitions dans la cellule fille.
Quand le système MMR dysfonctionne (anomalie sur les 2 copies du gène), la cellule n’a plus la capacité de recopier fidèlement ces motifs répétés, il en découle une instabilité du nombre de répétitions de ces microsatellites lorsque l’on étudie plusieurs cellules (d’un polype ou d’un cancer colique) : 8 répétitions dans certaines cellules, 10 dans d’autres, 12, 14, 18, 20 ….

2) Une augmentation du risque d’apparition de pathologies cancéreuses par la multiplication des erreurs de copie qui peuvent se localiser sur des gènes impliquées dans la voie de la cancérogenèse.
Au total, le phénotype RER (ou phénotype MSI, ou instabilité des microsatellites) permet actuellement d’affiner le dépistage des situations personnelles ou familiales pouvant être évocatrices d’un syndrome de HNPCC/Lynch. Cette pathologie est donc secondaire à la présence d’un défaut sur l’une des deux copies du gène impliqué et le phénotype RER apparaît dans une cellule, ou plutôt un groupe de cellules qui ont, à la faveur des divisions cellulaires, « perdu » la copie normale du gène.

I. Mortemousque – Fév 2011

1999-2009 : Dix ans d’activité sur le syndrome de Lynch

Dr Sylviane Olschwang Institut Paoli-Calmettes et Centre de Recherches en Cancérologie de Marseille (UMR891)

Connu à travers une première description médicale de Warthin dès 1913, puis individualisé en tant que syndrome en 1966 par Lynch, il a pu être relié a la présence de mutations responsables de la prédisposition au cancer en 1993. C’était le début d’une longue série, 4 gènes étant désormais associés au syndrome de Lynch, MSH2, MLH1, MSH6 et PMS2 ; tous sont des gènes dits MMR, qui contrôlent la qualité de l’ADN dans les cellules en division. Les mutations sont multiples, mais leurs conséquences sur le risque de cancer sont très semblables. Dès l’identification des deux gènes principaux, MSH2 en 1993 et MLH1 en 1994, quelques laboratoires d’oncogénétique moléculaire français ont proposé d’analyser ces gènes avec l’objectif d’intégrer cette analyse dans la prise en charge médicale des patients concernés. Ils étaient au nombre de 3 en 1995, 6 en 1998 et le réseau permettant de discuter et d’harmoniser les pratiques de ces laboratoires a été créé en 2000.

Deux ans plus tard, le ministère de la santé prenait la décision de financer les activités d’oncogénétique, plus tard relayé par l’Institut National du Cancer (INCa). Entre 2002 et 2009, une nouvelle facette de l’oncogénétique a chaque année été financée : 25 laboratoires en 2002, l’élaboration de recommandations nationales d’identification et de prise en charge du syndrome de Lynch et de la prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire (BRCA) en 2003, 48 structures de consultation rayonnant sur 102 sites dans 66 villes en 2004. Les laboratoires ont vu leur activité renforcée en 2005, puis étendue grâce à la création de réseaux de prédispositions rares au développement de tumeurs en 2005 et la mise en place de bases nationales des mutations des gènes MMR et BRCA en 2006. Le développement de la formation des conseillers génétiques a permis leur intégration aux consultations en 2008. Un autre aspect de l’oncogénétique, en plein essor, a été financé en 2007 via l’implantation de 28 plateformes de génétique somatique regroupant 49 laboratoires, au sein desquels sont pratiquées les analyses génétiques des cellules cancéreuses, qui entrent dans l’évaluation diagnostique et thérapeutique des cancers. La promotion de leur intégration aux services hospitaliers de pathologie, qui deviennent progressivement des structures plus larges de bio-pathologie, a également été faite grâce à de nouveaux financements de l’INCa en 2008 et 2009, destinés à s’étendre en 2010.

En ce qui concerne spécifiquement le syndrome de Lynch, la mutation des gènes MMR a pour conséquence une dérive importante de la qualité de l’ADN dans les cellules cancéreuses, appelée phénotype MSI, qui est aisément reconnue par une analyse génétique de l’ADN, extrait de ces cellules à partir de prélèvements de tissus conservés dans les laboratoires d’anatomie pathologique en ayant fait l’analyse initiale, lors de leur prélèvement (biopsie, intervention chirurgicale …). Les recommandations nationales pour l’identification du syndrome de Lynch précisent qu’il est utile de réaliser cette analyse chez tous les patients atteints d’un cancer qui pourrait s’intégrer dans un syndrome de Lynch (côlon, rectum, endomètre …), dès lors qu’il survient avant l’âge de 60 ans (http://www.john-libbey-eurotext.fr/fr/revues/medecine/bdc/e-docs/00/04/08/08/resume.phtml ).

L’analyse synthétique du bilan de l’activité d’oncogénétique en France depuis le début de son financement fait apparaître que 70 à 80% concerne le syndrome de Lynch et la prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire, et qu’il faudrait renforcer les efforts pour le syndrome de Lynch, aussi fréquent que la prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire dans la population, alors qu’il n’aboutit à une prise en charge oncogénétique que dans une proportion deux fois moins importante. En particulier, ce travail de synthèse met l’accent sur la nécessité de promouvoir la systématisation des analyses génétiques somatiques à la recherche d’un phénotype MSI, telle qu’elle a été recommandée en 2003 (http://www.e-cancer.fr/v1/fichiers/public/bd_activite_oncogenetique_rapport_final.pdf ).

Le développement de l’activité d’oncogénétique autour du syndrome de Lynch a permis l’harmonisation progressive des pratiques d’identification et de prise en charge. Un effort important reste encore à fournir pour généraliser ces pratiques. Néanmoins, de nombreux progrès ont été faits dans la connaissance des risques de cancer liés à la présence d’une mutation d’un gène MMR grâce à deux études nationales initiées à partir de l’activité des laboratoires pour la première*, et de celle des consultations pour la seconde**, appelée ERISCAM, actuellement en cours. A l’issue du premier travail de synthèse sur le syndrome de Lynch en 2003, les recommandations de prise en charge des risques de cancer ont été affinées et sont accessibles dans leur intégralité sur le site de l’INCa (http://www.e-cancer.fr/Les-Soins/Oncogenetique/op_1-it_153-la_1-ve_1.html ). Les présentations de la matinée en présentent une synthèse en tous points d’actualité.

Enfin, des recherches sont menées dans les domaines de la prévention et de la quantification précise des risques des personnes porteuses d’une mutation dans un gène MMR. Il s’agit pour les deux aspects d’études internationales à très large échelle, l’étude CAP ait l’objet d’une communication spécifique, et l’étude MOMA. Cette dernière est coordonnée par Malcolm Dunlop en Grande-Bretagne et cherche à identifier des variations de risque entre les personnes porteuses de mutations identiques.
L’hypothèse est leur constitution génétique propre, naturellement variable en dehors de cette mutation, serait à même d’influer sur le risque de cancer, en l’augmentant ou en le diminuant.

Il est maintenant connu, par exemple, que le cancer du colon ou du rectum, lorsqu’il survient, se développe chez les femmes en moyenne dix ans plus tard que chez les hommes, et la question se pose de différer le début du dépistage par coloscopie. Mais il est indispensable pour prendre une telle décision d’avoir des arguments irréfutables d’efficacité.
Aussi, cette question nécessite une étude plus large et complète, qui s’étend au-delà de la simple observation du sexe. C’est le but de l’étude MOMA, qui cherche à identifier ce qu’on appelle des gènes modificateurs des mutations des gènes MMR.
En conclusion, ces dix dernières années ont été d’une grande richesse pour notre compréhension des prédispositions génétiques aux cancers fréquents. Tous nos efforts, tant dans une démarche médicale que pour le développement des recherches, ont été soutenus par l’INCa, et les prochaines années, à travers les projets décrits brièvement ici, laissent présager une poursuite productive de l’ensemble de ces activités.

* Parc Y, Boisson C, Thomas G, Olschwang S. Cancer risk in 348 french MSH2 or MLH1 gene carriers. J Med Genet 2003;40:208-213 – Olschwang S, Lasset C, Baert-Desurmont S, Buisine MP, Wang Q, Hutter P, Rouleau E, Caron O, Bourdon V, Thomas G. Age dependent cancer risk is not different in between MSH2 and MLH1 mutation carriers. J Cancer Epidemiol. 2009
** Carayol J, Bonaïti-Pellié C. Estimating penetrance from family data using a retrospective likelihood when ascertainment depends on genotype and age of onset. Genet Epidemiol 2004;27:109-17.

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Dr Sylviane Olschwang – Octobre 2009

L’association – Ses buts et ses moyens

L’association HNPCC – Ses buts et ses moyens

L’Association HNPCC – Lynch regroupe des familles confrontées à la maladie et attentives à l’évolution des connaissances qui s’y rapportent. Récemment créée (parution au Journal Officiel du 23 Octobre 1999) l’association est régie par la loi du Ier juillet 1901 et le décret du 16 août 1901.

SES BUTS

Contribuer au développement des recherches sur le syndrome HNPCC, également connu sous la dénomination de syndrome de Lynch.
Diffuser les résultats de cette recherche.
Favoriser la prévention, le suivi régulier et systématique des patients et faire connaître les possibilités des différents traitements.
Soutenir les familles, les informer et leur apporter les conseils des spécialistes de ces maladies à caractère génétique.
Développer des actions auprès de la population et des institutions pour une meilleure connaissance de la maladie.

SES MOYENS

La brochure « Vivre avec un syndrome HNPCC » publiée en Juillet 2009 : 4è édition avec mises à jour.
La lettre aux adhérents diffusée 3 fois par an avec des articles de fond.
Un document diffusé à grande échelle présentant brièvement le syndrome HNPCC, le Conseil Scientifique et le Conseil d’Administration.
Le site internet où vous trouverez toutes les explications concernant cette maladie. Elles sont intégralement reprises dans la brochure « Vivre avec un syndrome HNPCC » .
La Newsletter avec les articles de fond des lettres aux adhérents. Elle vous sera adressée automatiquement en nous écrivant à contact@hnpcc-lynch.com avec en titre de votre e mail « Abonnement à la newsletter ».

MAP, une nouvelle classe dans les maladies héréditaires qui prédisposent au cancer colorectal

Dr Sylviane OLSCHWANG, Institut Paoli-Calmettes, INSERM 599, Marseille, Pour le conseil scientifique de l’association HNPCC-France – olschwangs@marseille.fnclcc.fr
La polypose adénomateuse familiale, FAP est une maladie connue depuis longtemps, qui se caractérise par le développement de plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de polypes adénomateux sur le colon et le rectum. Les premiers polypes apparaissent généralement autour de la puberté, plutôt dans le colon gauche et sigmoïde. La polypose s’étend ensuite, si bien qu’il est habituellement proposé une intervention chirurgicale à laquelle ne peut se substituer une surveillance endoscopique au long cours, la colectomie seule permettant de supprimer le risque de dégénérescence lorsque la polypose est diffuse. La transmission de cette maladie est autosomique dominante, due à la présence d’une mutation constitutionnelle dans le gène appelé APC (identifié en 1991), qui peut se situer n’importe où sur le gène. L’expression principale d’une telle mutation, à savoir le développement des polypes adénomateux colorectaux, est complète à 40 ans. Cette mutation prédispose, en outre, au développement de polypes dans l’estomac : la polypose fundique glandulokystique, sans risque de dégénérescence, et dans le duodenum, dont la surveillance endoscopique est importante. D’autres manifestations peuvent être décelées, caractéristiques du gène APC, qui sont l’hyperpigmentation de la rétine, CHRPE, et des énostoses, condensations sur les os de la tête sans conséquence pathologique. Plus rarement, il existe un risque de tumeur desmoïde ou d’autres tissus, sans que ces risques néanmoins justifient un dépistage spécifique.
En dehors de cette forme « classique » de polypose adénomateuse rare, il existe une polypose « atténuée » appelée AAPC lorsque elle se limite à la polypose digestive, et plus généralement AFAP, lorsqu’il existe également des manifestations extra-digestives. Cette forme atténuée se caractérise par le développement de polypes adénomateux dénombrables par endoscopie, à un âge plus tardif et plutôt dans le colon droit, qui nécessite rarement le recours à une intervention chirurgicale radicale. Cette forme « atténuée » est due parfois à des mutations du gène APC, situées à des endroits bien particuliers du gène, appelés exons 3, 4 et 9. C’est la forme AAPC, identifiée en 1993. La forme AFAP non exclusivement digestive est due à des mutations à l’autre extrémité du gène APC et a été découverte plus récemment. La présence de manifestations extra-digestives chez une personne ayant une polypose signifie que le gène APC en est à l’origine.
La présence d’une polypose adénomateuse digestive isolée, AAPC, chez une personne adulte signifie que le gène APC peut être responsable, mais pas toujours.
La forme AAPC peut être également (beaucoup plus fréquemment) causée par des mutations d’autres gènes, en particulier MYH, découvert en 2002.
Cette polypose, appelée MAP, est donc une nouvelle catégorie des polyposes adénomateuses « atténuées ». Il apparaît, dans cette polypose MAP, que le risque d’évolution des adénomes colorectaux, même peu nombreux, soit comparable au syndrome HNPCC, et c’est la raison pour laquelle, actuellement, les recommandations de dépistage par coloscopie sont identiques. Le risque de développement de polypes adénomateux dans le duodenum rejoint par contre celui de la polypose adénomateuse « classique », et il est donc proposé d’adjoindre au dépistage par coloscopie, un examen endoscopique de la partie haute du tube digestif, au même rythme. En revanche, il ne semble pas exister de manifestation extra-digestive.
La polypose AAPC, en particulier la polypose MAP, est donc une maladie hybride entre la polypose adénomateuse « classique » et le syndrome HNPCC, mais bien distincte, que les caractéristiques cliniques et biologiques permettent de reconnaître et qui peut aujourd’hui bénéficier d’une prise en charge spécifique.

Sylviane Olschwang – mars 2006

Organisation nationale des laboratoires de génétique

Pr Thierry Frébourg service de Génétique CHU de Rouen
Matinée d’Information sur le syndrome HNPCC, Rouen, Samedi 18 Octobre 2003

Lorsque la mutation a été identifiée chez le cas index , les membres de la famille pourront bénéficier, à partir de l’âge de 18 ans, de la recherche de cette mutation au décours d’une consultation de génétique. Les sujets non porteurs de la mutation n’auront pas besoin d’avoir une surveillance médicale particulière alors que les sujets porteurs auront tous les 2 ans un dépistage des tumeurs du colon et du rectum et chez les femmes des tumeurs de l’utérus.
Le diagnostic génétique du syndrome HNPCC étant compliqué (chaque famille atteinte présentant le plus souvent une mutation particulière, c’est à dire une faute d’orthographe sur son patrimoine génétique qui lui est spécifique) la prise en charge du syndrome HNPCC a imposé une organisation et une coordination nationale des laboratoires effectuant ces analyses en France : Tous les laboratoires français réalisant le diagnostic du syndrome HNPCC se réunissent régulièrement, mettent en commun leurs résultats et collaborent pour mettre au point de nouvelles analyses permettant de détecter des mutations qui échappaient jusqu’à présent aux méthodes d’analyse utilisées.
Début 2003, les laboratoires réalisant le diagnostic du syndrome ont reçu du Ministère de la Santé, après évaluation de leur activité, des financements importants.
Il s’agit des laboratoires de génétique du CHU de Rouen, de Saint Antoine à Paris, du Centre Léon Bérard à Lyon, du CHU de Lille, de l’Institut Bergonié à Bordeaux, du CHU de Montpellier, Strasbourg, de l’Institut Paoli Calmette à Marseille, de Hôpital Cochin à Paris, et du CHU de Nancy.
Ces financements permettent aux laboratoires de recruter du personnel, d’augmenter leur activité, et donc
d’analyser plus de familles et de réduire les délais des analyses. La prochaine étape de l’amélioration de la prise en charge du syndrome HNPCC, prévue dès début 2004, sera le renforcement des consultations de génétique par le Ministère de la santé, ce qui permettra, en particulier, de pouvoir proposer aux familles une aide psychologique.
Février 2004 : quatorze laboratoires sont à ce jour spécialisés dans les analyses du syndrome HNPCC/Lynch

Le Pr. Thierry Frébourg, CHU de Rouen nous précise que  » l’activité en réseau des laboratoires HNPCC fonctionne très bien et a permis la mise en place rapide d’un premier contrôle de qualité des laboratoires.
D’autre part, le problème de la détection des remaniements des gènes MSH2 et MLH1 étant réglé,
notre objectif en 2004 est de développer de nouvelles technologies permettant de détecter les mutations touchant les régions des gènes MSH2 et MLH1 non explorées, le but étant d’augmenter le pourcentage des familles avec mutation identifiée qui peuvent bénéficier d’une prise en charge codifiée. « 
Les Laboratoires peuvent se trouver sur le site www.orpha.net en cherchant la maladie rare < hnpcc>
Les Consultations peuvent se trouver sur le site www.fnclcc.fr <mÉdecins spécialistes= » »>< consultants en oncogénétique>

Instabilité Génétique

Professeur Pierre Laurent-Puig, Service de Chirurgie Digestive et Oncologique, Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris et Faculté de Médecine Paris 5, Université Renée Descartes

Les molécules d’ADN qui sont présentes dans le noyau des cellules portent l’information génétique permettant à nos cellules d’effectuer les différentes tâches nécessaires à notre organisme. Ces cellules sont en perpétuel renouvellement et pour assurer la transmission de l’information génétique aux deux cellules filles, la cellule mère avant de se diviser doit répliquer son matériel génétique à l’identique. Des ADN polymérases sont impliquées dans cette tâche, ces enzymes ont une fidélité de recopie imparfaite et des erreurs sont commises tout au long de la molécule d’ADN.
Il existe cependant une variation dans ce taux d’erreur qui dépend de la structure de la molécule d’ADN et de l’enchaînement des 4 bases élémentaires qui composent la chaîne d’ADN. En particulier les séquences répétées, composée d’un, de deux ou de trois nucléotides répétés n fois sont le siège d’erreurs plus fréquentes lors de la duplication de la molécule d’ADN (séquences microsatellite), le nombre de ces répétitions varie alors d’une ou plusieurs répétitions. Ces erreurs sont corrigées par différents systèmes enzymatiques de réparation qui permettent à la cellule mère de transmettre le matériel génétique le plus intact possible aux deux cellules filles afin d’éviter la survenue de mutations qui pourraient entraîner un dysfonctionnement de la cellule.
Un certain nombre de maladies humaines trouvent leur origine dans un dysfonctionnement de ces systèmes de réparation. C’est le cas dans le syndrome HNPCC. En effet, les protéines MSH2 MLH1 et MSH6 altérées dans le syndrome HNPCC participent au système de réparation des mésappariement de l’ADN. Ces altérations modifient la capacité de nos cellules à réparer les lésions induites et entraînent une instabilité génétique caractéristique du syndrome HNPCC se traduisant par une instabilité des loci microsatellitaires.
Cette anomalie est à la base du test MSI* proposé pour l’analyse des caractéristiques moléculaires des cellules tumorales prélevées sur un fragment d’une tumeur colorectale. Chez un sujet jeune atteint d’un cancer colorectal, la présence d’une telle instabilité au niveau de ces cellules tumorales est un argument qui doit faire suspecter l’existence d’une prédisposition familiale de type HNPCC indépendamment de l’histoire familiale ou personnelle du malade. Ce test est de réalisation simple et il est de plus en plus diffusé au sein des laboratoires de biologie moléculaire. Il permet lorsqu’il est positif (présence d’une instabilité) de renforcer l’impression clinique de prédisposition génétique de type HNPCC et d’orienter les malades vers une consultation d’oncogénétique.
* MicroSatillite Instability

Pierre Laurent-Puig – Novembre 200